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Une pensée pour dix
mille ans
Les sages, toujours occupant
les dix directions,
Pénètrent tous ce principe.
Ce principe ni connaît ni hâte
ni lenteur –
Une pensée pour dix mille ans.
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Ce passage démontre clairement que l’unité spirituelle
constitue la clé de la sagesse. Ce n’est qu’une fois qu’on a atteint ce niveau
de développement spirituel que l’on est en mesure de se débarrasser soi-même de
notre ignorance – le fondement même de notre souffrance.
Il est vain de percevoir cet état comme étant «hâtif»,
c’est-à-dire temporel, et pourtant il n’est pas «lent», c’est-à-dire constant.
On peut très bien inverser l’affirmation et se dire qu’il est aussi temporel
qu’éternel. Il est temporel, car rien ne dure, et il est éternel, car la seule
chose qui demeurera toujours, c’est le changement.
«Dix mille ans» est une image employée en chinois pour
désigner ce qui n’a pas de fin. La phrase Une pensée pour dix mille ans a donné
lieu à bien des interprétations.
Une explication serait que la phrase décrit l’esprit devenu
cristallin à un point tel qu’il arrive à se concentrer parfaitement. Une seule
pensée dure pour toujours. Est-ce possible? Non, car comme nous l’avons
souligné plus haut, l’esprit est toujours en mouvement, ne serait-ce que de
façon subtile, peu importe à quel point l’on atteint l’immobilité.
Une seconde explication serait qu’il n’y a pas d’esprit
individuel, que notre esprit limité cesse d’exister au moment où il se fond à
l’esprit supérieur, l’esprit universel, la vacuité – peu importe les termes dont
on usera pour décrire l’indescriptible. Un esprit qui ne se meut pas du tout
n’existe pas.
La troisième explication, je ne puis vous la donner.
Personne ne le peut. Et c’est, selon toute probabilité, la plus juste.
Cette seule phrase a inspiré bien des hommes à travers les
siècles et c’est, légitimement, l’une des plus célèbres phrases du ch’an ou du
zen.
Et pourtant, n’est-elle pas d’un vague aussi remarquable que terriblement
attrayant? Comme le Tao. C’est peut-être la raison pour laquelle il est si
inspirant. Il est aussi illusoire que la sagesse elle-même, dont il constitue la
parfaite description.
Et pourtant – j’en ai l’assurance – il vous apparaîtra
évident au moment où vous atteindrez l’état d’unité parfaite avec chaque chose.
Derek Lin.
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